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Policy Paper
Après l’intervention russe en Syrie, l’intensification des frappes aériennes de la coalition arabo- occidentale sur les positions de Daech et la libération d’une partie des provinces occupées par l’organisation en Irak, les voix commencent à s’élever dans plusieurs cercles officiels pour annoncer la fin prochaine de « l’organisation Etat islamique ».
Daech a subi sur le terrain de sérieux revers. De Ramadi à Palmyre en passant par Kobané et Tikrit, Russes, américains, armée irakienne, Hachd Chaabi, aviation de Bechar Assad, kurdes et autres groupes de l’opposition armée, sont arrivés à faire reculer Daech. L’organisation a été bouté hors de quelques 30 à 40 % du territoire qu’elle contrôlait jusqu’en juillet 2015.
Cette période euphorique qui s’annonce, rappelle celle de 2010, lorsque le général Ray Odierno, commandant des forces américaines en Irak annonce que : « quatre-vingts pour cent de leurs chefs [Etat islamique en Iraq] sont morts ou arrêtés ! Quant aux autres, ils en bavent ». Par ces propos le Général américain annonçait la fin d’un autre Etat islamique, celui d’Iraq, né en 2006 après la mort d’Abou Mosaab Al Zarqawi. Pourtant, moins de quatre ans plus tard, ont surgi l’Etat islamique en Irak et au Levant d’abord et l’Etat islamo-califal que l’on s’accorde à appeler Daech ensuite.
La dislocation annoncée de « l’organisation Etat islamique » va-t-elle cette fois être réelle, définitive et sans risque de résurgence sous quelque forme que ce soit ? Ou est-ce un simple effet d’annonce ; un épisode du flux et reflux qui se joue dans l’océan d’incertitude qui submerge la région ?
N’est-il pas utile, voire judicieux, d’identifier d’abord cette structure que nous voulons déconstruire ? Car ce n’est qu’en l’identifiant d’abord que l’on peut ensuite vérifier si l’action de déconstruction a permis de l’éradiquer ; car c’est d’éradiquer qu’il s’agit et non pas de neutraliser momentanément avec le risque de retour sous des formes différentes ou ailleurs sous d’autres cieux. Il est dans ce sens nécessaire d’éviter l’économie d’une rétrospective utile pour nous demander d’où nous vient Daech et comment elle s’est métamorphosée pour nous apparaitre sous sa forme actuelle? Il est d’autre part incontournable, dans cet effort d’identification, de se poser des questions sur la nature de l’organisation, ses ambitions et ses objectifs ainsi que sur ses motivations et les conjonctures qui ont facilité son émergence.
Faute de connaissance du phénomène, de ses racines et de l’environnement ayant favorisé son avènement et son épanouissement, les actions de lutte et les épisodes de combats, ne traiteront que les symptômes en épargnant les causes et les motivations qui sous-tendent le phénomène et l’environnement qui le couve en permettant son développement.
S’agit-il d’une métamorphose d’Al Qaeda, d’une continuation sous une nouvelle forme (dissidente) ou est-ce un nouveau phénomène ?