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Policy Paper
La région Asie-Pacifique est plus que jamais prioritaire pour la politique étrangère chinoise. Il s’y concentre une somme d’intérêts économiques, énergétiques et de sécurité majeurs pour Pékin.
La Chine tente de consolider son statut de puissance régionale en menant une diplomatie proactive envers l’ensemble de son voisinage. D’une part, elle y renforce sa diplomatie économique (l’accent est notamment mis sur la construction d’infrastructures de transports). D’autre part, elle maintient une position ferme sur les différends territoriaux et frontaliers et multiplie les coups de force en mers de Chine orientale et méridionale en particulier.
Cette double approche régionale n’est pas nouvelle, elle avait déjà été amorcée sous Hu Jintao. Mais à l’évidence, depuis le 18e congrès du Parti communiste en novembre 2012, Xi Jinping tente de passer à la vitesse supérieure dans la consolidation de la présence économique et l’assise géostratégique de la Chine en Asie-Pacifique.
Ce changement de rythme doit être compris dans le contexte plus large d’une compétition renforcée entre la Chine et les États-Unis à l’échelle de la région. La Chine souhaite limiter l’influence américaine dans cette zone à plusieurs niveaux : militaire, économique, financier, institutionnel…
Pour l’instant, la Chine demeure relativement isolée en Asie. Les initiatives en mers de Chine et, plus largement, les incertitudes sur les ambitions réelles de Pékin dans la région tendent à profiter aux États-Unis et au Japon, qui renforcent leurs liens avec les voisins inquiets de la montée en puissance de la Chine.
La politique régionale de la Chine est encore en cours d’élaboration. Elle se déploie tous azimuts, avec pragmatisme, et au gré des opportunités. Les modalités concrètes d’application de certaines initiatives, telles que celles des « nouvelles routes de la soie », demeurent floues pour les acteurs chinois comme pour les voisins directement concernés. Si ces initiatives ne sont pas à négliger, leurs impacts économiques et géopolitiques restent à évaluer au cours des prochaines années. La diplomatie économique chinoise risque de se heurter à la présence économique d’autres acteurs régionaux majeurs au fur et à mesure de son déploiement (Russie en Asie centrale, Japon en Asie du Sud-Est, Inde dans l’océan Indien et en Asie du Sud notamment).
Il est probable que des ambiguïtés persistent pendant plusieurs années et que la Chine continue à mener des offensives à la fois de charme et de fermeté vis-à-vis de son voisinage, car il apparaît qu’elle n’a pour l’instant pas les moyens (institutionnels, opérationnels) d’élaborer une stratégie économique et de sécurité coordonnée sur l’ensemble de cette zone vaste et complexe.
Toutefois, une stratégie régionale à formation lente pourrait émerger progressivement au cours du mandat de Xi Jinping (2012-2022), dans le cas où Pékin parviendrait à jouer à court terme sur son attractivité économique pour bâtir une sphère d’influence élargie qui lui serait politiquement favorable à plus long terme. Cela dépendra en partie de la capacité du gouvernement central chinois à coordonner sa politique étrangère à l’échelle de la région, de sa capacité à communiquer vis-à-vis de son voisinage, mais aussi de l’évolution du contexte économique régional et national.
Cette étude a été réalisée dans le cadre du partenariat entre l’Institut français des relations internationales (Ifri) et l'OCP Policy Center.