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Opinion
Mondialisation oblige, les frontières se trouveront en tête des préoccupations mondiales en temps de pandémie. Un dilemme se pose entre :
- D’une part, le souci, pour chaque pays, de se protéger contre la dissémination du virus provenant des pays les plus touchés ;
- d’autre part, le souci de préserver l’ouverture aux autres Etats du monde, nécessaire à la survie de l’économie en raison de l’interdépendance accentuée par la mondialisation.
La circulation des personnes, fonction par excellence des frontières, a été le premier domaine révisé par quasiment l’ensemble des Etats du monde, dès que la menace du Covid-19 s’est précisée à la mi-février 2020 :
- Les premières mesures ont consisté en un contrôle de la température des voyageurs avant leur accès par les ports ou aéroports ;
- les lignes aériennes et maritimes de transport de passagers ont été, d’abord partiellement, et, ensuite quasi-totalement, mises en berne, clouant les flottes aériennes au sol et maritimes dans leurs ports d’attache et transformant ports et aéroports en espaces déserts.
- les Etats ont charterisé avions et navires pour rapatrier leurs ressortissants bloqués dans des pays étrangers ;
- les passages frontaliers terrestres ont été, pour une grande partie, fermés à la circulation des personnes ;
- les seuls trafics internationaux épargnés sont les mouvements de fret et de marchandises.
La mobilité des personnes après la pandémie
La pandémie avait conforté la mondialisation dans son action la plus critiquée – surtout par les pays du Sud- celle qui consiste à encourager au maximum la circulation des biens en restreignant au maximum la circulation des personnes, principalement du Sud vers le Nord. Le Covid-19 a cependant nivelé la question, en interdisant la circulation des personnes dans les deux sens.
S’agit-il d’un panorama provisoire qui disparaîtra dès la fin de la pandémie, ou est-ce que la notion de circulation transfrontières des personnes changera de signification et de paramètres même après la crise du Coronavirus ?
A première vue, il est fort probable que la crise pandémique actuelle ne changerait rien au régime de la circulation transfrontière des personnes. Plusieurs pays du Sud ne peuvent prétendre à l’exigence d’une réciprocité dans ce domaine. Ils sont tellement dépendants des pays du Nord qu’ils se suffisent d’un régime de compensation qui veut qu’ils reçoivent certains avantages en contrepartie d’un libre accès à leurs territoires pour les ressortissants des pays nantis. De plus, plusieurs pays du Sud dépendent du tourisme comme source de revenus et ne peuvent, donc, prendre aucune mesure de restriction face à leurs clients du Nord.
Nouvelle catégorisation des pays du Sud !
Les pays du Sud se verraient, par contre, imposer plus de restrictions, surtout durant les premiers mois de la reprise après la Coronavirus. Aux visas et autres restrictions déjà existantes et généralisées imposées aux ressortissants du Sud pour leurs voyages dans le Nord, s’ajouteraient celles concernant la santé. Des certificats et attestations de vaccination, des visites médicales, voire mêmes des analyses récentes, peuvent être ajoutées à l’arsenal des contraintes imposées par les pays du Nord à ceux qu’ils qualifient comme source de la migration.
Les frontières ont réciproquement servi de rempart et de bouclier entre tous les Etats du monde lors de cette pandémie ; même dans les espaces ou la libre circulation semblait avoir acquis des droits inaliénables. Seront-elles ré-ouvertes à la fin de la crise et dans quelles conditions ?
Si une reprise est très probable entre Etats du Nord, il semblerait quasi utopique d’espérer un quelconque changement dans le statut de circulation transfrontière des ressortissants du Sud vers le Nord. Les conditions seront même plus sévères.
N’assisterons-nous pas, également, à une sorte de différenciation par les pays du Nord vis-à-vis des pays du Sud, en accordant plus de facilités à ceux ayant maitrisé la gestion du fléau. La pandémie nous laisserait, dans ce cas, avec un Sud du Sud constitué de pays qui n’auront pas été assez résilients pour reprendre leur fonctionnement normal au même niveau d’avant Corona. Cette catégorie subirait une double peine. Celle infligée par la pandémie et celle que lui coûtera le boycott des investisseurs et des touristes du Nord.