Publications /
Opinion

Back
Atlantic Dialogues 2018 : pourquoi il faut relativiser l’impact de l’élection de Jair Bolsonaro au Brésil
Authors
Sabine Cessou
January 21, 2019

Un débat de haut niveau a porté sur le Brésil lors de la conférence internationale Atlantic Dialogues, organisée par Policy Center for the New South (PCNS), du 13 au 15 décembre 2018 à Marrakech. Lors de la session plénière intitulée “Brazil : What next ?”, les intervenants ont relativisé l’impact de l’élection du candidat populiste Jair Bolsonaro à la présidence du pays, le 28 octobre 2018. 

De manière forte, Alfredo Valladão, Senior Fellow au PCNS et Professeur à Science Po Paris, s’est inscrit en faux contre les perceptions dominantes : « Tellement de prédictions catastrophiques ont été faites sur le Brésil ces deux derniers mois… Le Brésil ne disparaîtra pas dans le trou, car il est plus grand que le trou ! ». Ce pays, membre des BRICS et géant économique, représente en effet 50 % de l’économie d’Amérique du Sud. Laura Albornoz, Senior Fellow du Adrienne Arsht Latin America Center, et ancienne ministre de la Femme au Chili, a également plaidé pour la prudence au sujet du Brésil : « Il s’agit d’observer comment des conservatismes extrêmes peuvent s'installer dans ce pays comme dans d'autres régions du monde. Le problème ne tient pas seulement au langage que Jair Bolsonaro utilise, mais à son cabinet, qui n'a rien d'égalitaire ». 

« L’état de grâce de Jair Bolsonaro va être de courte durée », a analysé Geraldo Alckmin, gouverneur de l’Etat de Sao Paulo depuis 2001, arrivé à la tête du Parti social démocrate du Brésil en deuxième position lors de la Présidentielle de 2006. « Je vois cependant la possibilité d'un cycle de croissance plus forte, parce que l'inflation est basse, de même que les taux d'intérêt », a-t-il poursuivi. Cette figure politique a estimé que « le nouveau gouvernement donne la priorité à la corporation et non au parti politique, avec le lobby de l’armement, les agriculteurs, les évangélistes, etc… c’est toutes ces corporations qui sont mises en avant et non pas l’intérêt général ». 

Entre les corporatismes et les églises évangéliques

Alfredo Valladão a, de son côté, rappelé que les électeurs de gauche se trouvent dans les régions où les programmes sociaux sont les plus importants, tels que Borsa Familia. Il a pointé un facteur important : « A la périphérie des grandes villes, les classes moyennes qui ont émergé sous le gouvernement de Lula ces dernières années et qui se sentent menacées sont en grande partie membres des églises évangélistes. Ces dernières ont une nouvelle théorie : la théologie de la prospérité, sans Etat mais avec le succès individuel, la méritocratie et l’entrepreneuriat. Ces gens sont allés de la gauche vers la droite ». Ce phénomène ne donne pas pour autant les pleins pouvoirs au nouveau président ultra-libéral. « À l’intérieur du congrès, Bolsanaro n’est pas si puissant» , selon Alfredo Valladão qui considère que « pour tout ce qu'il voudra faire, il devra inventer une coalition, vote par vote, individu par individu ». 

Les fondamentaux n’en restent pas moins solides, a estimé Geraldo Ackmin : « La démocratie au Brésil est bien vivante, le débat existe avec un multipartisme vivant. D'autres choses me préoccupent, comme la politique extérieure du nouveau gouvernement sur le Pacte global sur la migration notamment, face à un monde plus riche et plus inégal. Le Brésil est un pays d'immigrants. Sao Paulo est la ville où les Japonais parlent portugais avec un accent italien. Nous devons avoir un Pacte global sur la migration. Nous ne sommes obligés à rien, mais c'est une question de valeurs ». Bolsonaro ne va pas « se jeter dans les bras de Trump, car la réalité est que le Brésil échange plus avec la Chine ». Le multilatéralisme mis à mal par le président des Etats-Unis ne paraît donc pas menacé par le Brésil, qui sera contraint de rester membre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et du Mercosur. 

RELATED CONTENT

  • Authors
    February 22, 2022
    “Once upon a time a classic first line in fairy tales, used by Charles Dickens, for example in his “A Christmas card” in 1843, or Charles Perrault, the French poet, writer of “Cinderella” and “Sleeping Beauty”, both published in 1697 in “histoires ou contes du temp passé” Once upon a time suggests a nostalgic touch, the good old, romantic days glamourized because negative memories are annihilated and deposed in the dustbin of the human mind. Once upon a time, Beirut, the capital ci ...
  • Authors
    February 17, 2022
    Their boat-if you name a large rubber pumped up like a giant tire, was rocked by waves, and the engine halted its movements. On November 24, all the 29 passengers tried to reach coastguard stations in France and England via their cell phones few minutes between life and death. No one answered, and when finally contact was established by another, still floating migrant boat, witnessing the tragedy in the making (New York Times December 14, 2021), they were asked to pinpoint their l ...
  • February 10, 2022
    Africafé est une émission du Policy Center for the New South qui décrypte l’actualité des organisations africaines et de l’Afrique. A travers de courtes interviews, l’émission tente de proposer d’aborder de manière pédagogique les enjeux des organisations africaines et l’actualité du co...
  • February 9, 2022
    In a country as stable as Germany, changes of Chancellor are a rarity. Angela Merkel stayed in power for sixteen years, as did Helmut Kohl in his time. The new three-party coalition (Social Democrats, Greens, Liberals) intends to shake up the country. How should Africa approach this new leadership? Can the new government bring momentum to Euro-African relations? Can Berlin bring about a clear understanding of Africa’s development issues and geopolitical subtleties? ...
  • Authors
    February 3, 2022
    His message was one of reassurance, just as a great leader has to react in a crisis. The concerns about Covid 19 was nothing but “a frenzy and psychosis”. The President knew the secret to defeat the virus: vodka, sauna, tractor. Didn’t a US president named Donald Trump suggest  that toilet cleaning disinfectants chase the virus out of infected lungs on national television? (New York Times, April 24, 2020) That was Trump-speak, sure, but the man who uttered the tractor/vodka/nonsense ...
  • Authors
    January 26, 2022
    Time was running out. The invisible, enemy combatants floated into the capital like ghosts. Unopposed, ready to take power, twenty years after they were chased out of town by American military might. August 15/16, 2021, historic days for the Taliban known for severe military and humanitarian abuses. The governor of the Central Bank of Afghanistan, Ajmar Ahmadi, did not wait for the Taliban to burst through his office doors. He disappeared, trying to find the plane waiting for his d ...
  • January 13, 2022
    Africafé est une émission du Policy Center for the New South qui décrypte l’actualité des organisations africaines et de l’Afrique. A travers de courtes interviews, l’émission tente de proposer d’aborder de manière pédagogique les enjeux des organisations africaines et l’actualité du co...
  • Authors
    January 12, 2022
    Feeble eyesight may hinder you from finding Puntland on a map, the unrecognized Federal member state in Somalia, Khaatumo State, Jubaland, or Somaliland, concerning the planet’s size just large enough to be covered by the shadow of a palm tree. Arab entities surrounded by sun and sand and the Gulf of Aden, Somaliland is surviving as a self-declared nation, located on the southern coast of the Gulf of Aden bordered by Djibouti to the northwest, Ethiopia to the south and west, Somalia ...