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L’économie marocaine se trouve aujourd’hui à une étape cruciale de son évolution. Le ralentissement tendanciel de la croissance, persistance du chômage de masse, faibles gains de productivité, perte en compétitivité, lenteur de la transformation structurelle, approfondissement des inégalités, déclassement social... etc. sont autant d’indicateurs, dont la liste n’est pas fermée, qui plaident pour le dépassement du modèle de croissance poursuivi depuis plusieurs années. La nécessité de renouveler ce modèle fait aujourd’hui, et plus que jamais, l’unanimité. La manière d’y parvenir ne va pas pour autant de soi et ne se fera pas naturellement du jour au lendemain. Cependant, il serait illusoire de repenser ce modèle sans placer les défis que posent les questions d’ouverture, de compétitivité et de productivité au centre de la réflexion.
Dans cette perspective, le Laboratoire d’Économie Appliquée (Université Med V) et le Policy Center for the New South se sont engagés dans un projet de recherche, appuyé par le Centre National pour la Recherche Scientifique et Technique, visant l’approfondissement des connaissances et d’analyses sur l’ouverture et les transformations structurelles de l’économie marocaine. Plusieurs manifestations et activités scientifiques ont été ainsi organisées, dont notamment la publication, en 2016, d’un ouvrage intitulé « Equilibres externes, compétitivité et processus de transformation structurelle de l’économie marocaine ».
Le présent ouvrage vise à prolonger cette réflexion en mettant le curseur sur les deux principales fragilités auxquelles se heurte le rehaussement du potentiel de la croissance de l’économie marocaine, à savoir une ouverture peu réussie et une productivité au ralenti. En effet, si le Maroc a misé, depuis belle lurette, sur l’ouverture, force est cependant de constater que le bilan de cette ouverture est mitigé, et dans tous les cas en deçà des attentes. D’une certaine manière, la faiblesse des gains de productivité est à la fois la cause et la conséquence de ce bilan peu satisfaisant. Elle est la cause parce qu’elle affecte la compétitivité de l’économie nationale et exerce des pressions sur son offre exportable traditionnelle. Elle l’empêche aussi de monter dans la gamme et de se libérer du « piège » des activités à faible contenu en valeur ajoutée et en technologie. Cette faiblesse des gains de productivité peut être vue, par ailleurs, comme la conséquence d’une ouverture peu préparée, peu maitrisée et peu orientée vers un positionnement dans les chaines de valeur mondiales permettant de profiter pleinement de ses retombées en termes de diffusion technologique, de renforcement de la capacité d’absorption, d’apprentissage par les exportations et d’autres externalités susceptibles d’améliorer la productivité tant factorielle que globale.
Cet ouvrage s’inscrit justement dans ce cadre et vise à apporter plus d’éclairage sur les liens existant entre ouverture, productivité et croissance économique. Il comprend une série de papiers sélectionnés en deux temps par le comité scientifique. D’abord, l’appel à communications lancé en juillet 2017 a permis de sélectionner 12 papiers, qui ont été présentés et discutés dans le cadre du colloque organisé sur la même thématique le 22 février 2018 à l’Université Med V. Ce colloque a été, par ailleurs, une occasion pour proposer des pistes de réflexion plus pertinentes et des approches méthodologiques plus appropriées. Ensuite, et sur la base des rapports des évaluateurs anonymes des papiers reçus en réponse à l’appel à contribution lancé en mars 2018, le comité scientifique a sélectionné les 16 papiers de cet ouvrage. Tout au long de ce processus de sélection, le comité scientifique a veillé à ce que les papiers retenus pour publication garantissent la diversité requise tant d’angles d’analyse, que d’approches méthodologiques.
C’est ainsi que les papiers retenus ont été répartis sur quatre parties. La première comprend les travaux qui traitent des canaux macro-économiques d’impact de l’ouverture sur la productivité et la croissance. Les investigations ont notamment mis l’accent sur les retombées de l’ouverture sur l’accumulation des capitaux (humain et institutionnel), le transfert technologique, la capacité d’absorption et les efforts en innovation. La deuxième partie regroupe les travaux ayant privilégié l’approche sectorielle. L’impact de l’ouverture sur le développement du secteur industriel, l’apprentissage par l’exportation des entreprises manufacturières, l’intégration du secteur automobile, et la contribution du changement structurel à la croissance de la productivité en constituent les principaux axes de réflexion. La troisième partie est constituée des papiers qui traitent des chocs liés à l’ouverture (volatilité de la croissance, prix du pétrole) et des politiques qui peuvent en atténuer les effets (régime et gestion du taux de change). Finalement, la quatrième partie se veut comme un focus sur l’intérêt et les enjeux de l’adhésion éventuelle du Maroc à la CEDEAO.