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Opinion
La nouvelle était largement attendue : mercredi 18 septembre 2024, et pour la première fois depuis 2020, la Réserve fédérale américaine (Fed) a diminué ses taux directeurs, les portant ainsi à 4,75 % et 5 %, soit une baisse significative de 50 points de base. En repli quasi-constant depuis juin 2022 où elle avait atteint une valeur record de 9,2 % en base annuelle, l’inflation américaine est désormais sous contrôle, tandis que les récentes statistiques du marché de l’emploi du pays ont déçu. Trop vite, trop fort ? Le risque de ‘’hard landing’’ d’une économie américaine n’offrant plus tous les gages de sa résilience passée ne peut être exclu au cours des prochains mois et ceci ne pouvait que conduire les autorités monétaires du pays – responsables, à parité, de la maîtrise du niveau général des prix et du soutien à la croissance économique nationale – à engager ce premier desserrement des taux. Et sans grande surprise, non plus, l’or a poursuivi son mouvement haussier entamé depuis de longs mois désormais. Mardi 1er octobre 2024, l’once s’affichait ainsi à plus de 2650 dollars sur le marché de Londres (LBMA, fixing de l’après-midi), soit une progression de près de 29 % depuis le début de l’année, et de 52 % et 74 % sur trois et cinq ans, respectivement. Volant de record en record, l’or semble désormais avoir une voie dégagée vers de nouveaux sommets et il ne serait guère étonnant que le seuil de $ 3 000 l’once soit atteint en 2025, voire avant.
Incertitude mondiale et taux d’intérêt : deux déterminants fondamentaux
Les déterminants du prix de l’or sont particulièrement nombreux : demande nette des banques centrales et des Exchange Traded Funds (ETF) – des fonds d’investissement dits « indiciels » ayant vocation à dupliquer la performance d’un actif réel ou financier, ou d’un indice boursier de référence –, vigueur de la consommation indienne ou chinoise et du secteur de la bijouterie, valeur du dollar ou, du côté de l’offre, le niveau cumulé de la production primaire et secondaire des groupes aurifères. Derrière ces différentes variables se dressent toutefois deux ‘’ drivers’’ importants et bien connus des cours du métal jaune : le degré d’incertitude planétaire, géopolitique notamment, et l’état de la politique monétaire américaine. L’or est évidemment une valeur refuge par exemple. Accepté par tous et partout, il s’affirme simultanément comme une réserve de valeur sûre et comme un moyen de paiement quasi-universel, affranchi de la défiance dont pâtissent parfois les systèmes bancaires en période de crise extrême et/ou dans certains pays en développement. Ainsi, toute tension/incertitude politique et géopolitique peut être de nature à se traduire par une augmentation des cours de l’once. Et, de l’Ukraine au Moyen-Orient en passant par la pandémie de la Covid-19 ou par l’issue encore très incertaine des prochaines élections américaines du 5 novembre, elles sont légion depuis 2020 et se sont largement conjuguées. Dans cette fonction de « rempart » face aux troubles du monde, l’or demeure toutefois concurrencé par les bons du trésor et obligations émis par les États les plus « sûrs », ceux bénéficiant du triple « AAA » de la part des agences de notation internationales, i.e. présentant aux investisseurs un risque de crédit particulièrement faible. Titres d’emprunt, ils servent un taux d’intérêt sur les sommes investies, tandis que le « seul » rendement de l’or est une éventuelle plus-value lors de sa revente. Dès lors, le niveau des « taux longs », celui de ces obligations d’État, est, toutes choses égales par ailleurs, inversement corrélé au cours de l’or : toute hausse de celui-ci est de nature à penser sur les prix de l’once. C’est ainsi, qu’après une importante progression observée en 2020 et 2021, l’or globalement stagné en 2022, à quelques $ 1 800 l’once en moyenne, malgré un pic en mars dû au déclenchement de la guerre en Ukraine. On peut toutefois remarquer un important rebond à compter d’octobre, alors même que la hausse des taux de la Fed n’était pas achevée. Une invalidation de la relation précédente évoquée ? Pas réellement. À cette période, les « marchés » avaient acté, comme évoqué précédemment, que la Fed reprenait progressivement le contrôle de l’inflation et que le rythme de la hausse des taux allait se ralentir, ce qu’il fit. Parce que les anticipations sont clés, ceci allait créer les conditions d’un alignement des facteurs géopolitiques et macroéconomiques, précédemment opposés, et à nouveau mener le métal précieux sur une trajectoire fortement ascendante.
L’once face aux développements du conflit au Moyen-Orient
Porté par la terrible aggravation du conflit israélo-palestinien où le risque d’embrasement de la région se renforce chaque jour, et désormais libéré de l’ancrage des taux d’intérêt, l’or devrait continuer à progresser au cours des prochains mois. Car, sur ses fondamentaux délétères se greffent les anticipations des opérateurs, investisseurs comme spéculateurs, et celles-ci sont fort logiquement haussières avec la volonté de « tester » ce nouveau sommet à $ 3000 l’once. Restera-t-il cependant durablement au-dessus de ce niveau, voire au-dessus ? Telle est, en définitive, la véritable question et, pour ce que ce métal précieux représente de l’état du monde, nul ne peut réellement le souhaiter.