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Le conflit Israélo-palestinien : la dernière chance pour une solution juste
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November 9, 2023

Le 6 octobre 1973, les autorités israéliennes ont été averties de l’éclatement imminent d’une guerre à leurs frontières avec les États arabes. Cet avertissement confirmait les informations reçues quelques jours auparavant, mais que les décideurs politiques et le Renseignement israéliens n’avaient pas pris au sérieux. Israël est pris par surprise et son armée est en panique. C’est la débâcle. Cinquante ans plus tard, quasiment jour pour jour, l’État hébreux est encore une fois surpris. En effet, le matin du 7 octobre 2023, des centaines d’hommes armés ont franchi la barrière entre Israël et Gaza, se sont répandus dans plus de 20 localités, ont tué plus d’un millier d’Israéliens, blessé environ 3000 autres et pris un certain nombre d’otages (nombre qui ne sera probablement connu avec précision qu’à la fin de la guerre), qu’ils ont emmenés à l’intérieur de la bande de Gaza. Plusieurs sources rapportent là aussi que les politiques israéliens auraient sous-évalué des informations faisant état de l’imminence d’une attaque à partir de Gaza.1

INTRODUCTION

Certaines similitudes entre les deux événements sont troublantes et dénotent une organisation maitrisée de la part des Palestiniens du Hamas, probablement avec l’aide de forces étrangères et/ou voisines de la région :

- dans les deux cas, le jour du déclenchement des opérations est un samedi, jour sacré chez les Juifs et qui pourrait expliquer un certain relâchement de la vigilance ;

- ces samedis sacrés, ont coïncidé dans les deux cas, avec des fêtes religieuses israéliennes, ce qui aurait renforcé le relâchement des forces israéliennes ;

- dans les deux cas, les services israéliens auraient failli dans l’interprétation des alertes qui leur étaient parvenues, faisant preuve d’une certaine arrogance qui s’appuie sur le mépris des capacités arabes et palestiniennes et également sur une surestimation des potentiels technologiques israéliens de défense ;

- Hamas aurait donc programmé son attaque pour qu’elle puisse, à quelques heures près, correspondre au jour de l’anniversaire d’octobre 1973, lui donnant ainsi plus de valeur symbolique et de force de mobilisation des foules dans les mondes arabe et musulman ;

- le Renseignement du Hamas aurait certainement observé, pendant plusieurs années, le comportement des forces d’Israël durant les samedis et jours de fêtes religieuses, notamment dans les zones ciblées par l’attaque, pour s’assurer de la baisse de vigilance durant ces périodes. Il en est de même de l’opération de 1973, qui a été préparée pendant une longue période d’observation, de cueillette d’information et d’opérations d’intoxication informative des forces de l’adversaire.

Que représente cet événement par rapport à l’histoire du conflit ?

- Doit-il être placé dans le cadre habituel, celui du conflit durable chargé d’escarmouches entre Israël et les Palestiniens ; auquel cas il reste un simple épisode de la série de confrontations ou une simple bataille dans la guerre, et sa valeur ne serait alors que tactique. Il pourrait marquer un succès du Hamas, sans pour autant que celui-ci puisse prétendre à une victoire finale ; comme il pourrait être interprété en tant qu’échec du Tsahal et d’Israël sans pour autant que ce dernier soit déclaré définitivement vaincu. Autrement dit, le caractère spectaculaire de l’opération ne change en rien la situation du conflit ;

- a-t-il une certaine singularité qui l’élèverait au rang de ‘’ Game changer ’’ et en faire un fait stratégique important qui changerait l’issue de la Question palestinienne en initiant une solution durable, voire finale du conflit ? Entrainerait-il la fin de la solution à deux États, comme le voudrait la droite et les partis religieux israéliens ? En découlerait-il la fin de l’existence d’Israël, comme le voudrait le Hamas ? Ou, donnerait-il lieu à une mise en œuvre, par la communauté internationale, de la solution à deux États, comme le prônent l’Autorité palestinienne, les partis israéliens modérés et tout esprit épris de justice et d’équité ? 

Il est peut-être prématuré de prédire les développements futurs de la Question, tellement le fait est singulier parce que la nature de la guerre entre les deux parties a changé :

- d’une part, la guerre n’est plus entre des États comme ce fut le cas dans les années 70, mais entre Israël et des Organisations armées plus enclines à pratiquer une guerre insurrectionnelle ;

- d’autre part, jamais Israël n’avait été attaqué sur son territoire ni enregistré autant de pertes que celles subies lors de l’attaque du 7 octobre.

La seule conséquence constatée, quasiment un mois après les faits, est une campagne israélienne de représailles contre le Hamas à Gaza empreinte d’une violence sans précédent, assortie d’un soutien militaire américain inédit et de déclarations guerrières menaçantes et sulfureuses contre Israël de la part de l’Iran et de ses proxys dans la région. Le tout accompagné d’une guerre médiatique des deux côtés pour tenter d’influencer l’opinion publique internationale.

I. LA FIN OU L’AFFAIBLISSEMENT PROBABLE DES DEUX EXTRÉMISMES

1. Une certitude politique dans le brouillard de la guerre : la fin du ‘’règne’’ de Benyamin Netanyahu et de l’aile religieuse extrémiste qui le soutient.

Au moment des faits du 7 octobre, Israël vivait une instabilité sans précédent illustrée par des fissures socio-politiques menaçant non seulement la renommée de la démocratie israélienne mais également son organisation et sa cohésion sociale. Le projet de Benyamin Netanyahu visant à s’accaparer, en tant qu’exécutif, les rênes de la justice et du pouvoir judiciaire, avait enflammé la rue israélienne et poussé la contestation jusque dans les rangs des militaires. Le pays en était arrivé à ce point d’éclatement et de division à cause des manœuvres d’un homme: Benyamin Netanyahu.

Leader du parti conservateur Likoud, il avait déjà exercé cette fonction de 1996 à 1999, puis de 2009 à 2021. Il revient au pouvoir au lendemain des élections législatives du 1er novembre 2022 pour conduire une coalition de six partis de droite et d’extrême droite, dont la doctrine principale est de vider la Palestine de sa population pour en faire un territoire israélien. L’extrême droite qui appuie Netanyahu le pousse aux pires exactions contre les populations palestiniennes et à tout faire pour qu’il n’y ait jamais d’État palestinien.

Par ailleurs, Netanyahu a fait l’objet de quatre enquêtes judiciaires qui ont abouti à son inculpation pour corruption, fraude et abus de confiance. En 2019, il devient le premier chef de gouvernement israélien à être inculpé tout en étant en exercice.

L’opinion publique israélienne est quasi unanime à lui imputer les défaillances du 7 octobre ayant couté à Israël plus de 1400 morts, près de 3000 blessés et 242 otages pris par le Hamas. Au-delà de ces pertes, le succès de l’opération du Hamas qui brise le mythe d’une armée et d’un renseignement israéliens réputés infaillibles est considéré par les Israéliens comme une catastrophe nationale dont Benyamin Netanyahu est responsable. Plusieurs griefs politiques et sécuritaires sont retenus contre ce dernier :

- la politique mise en place envers le Hamas est sévèrement critiquée par une majorité de l’opinion publique israélienne. Le leader du Likoud est accusé d’avoir encouragé le développement du Hamas et son accès au pouvoir dans la bande de Gaza et l’approfondissement du fossé qui la sépare de l’Autorité palestinienne, division qui vise à torpiller toute idée de création d’un État palestinien uni ;

- Benyamin Netanyahu aurait ignoré et sous-estimé la crédibilité en 2016 et 2023 des rapports émis respectivement par les services de renseignement et par des États de la région, faisant état de la préparation par le Hamas d’attaques contre le territoire israélien ;

- désireux d’affaiblir la Justice israélienne qui l’a inculpé dans des affaires pénales, Benyamin Netanyahu avait introduit des projets de loi qui ont sévèrement divisé la société israélienne et porté la protestation jusqu’aux rangs de l’armée.

De l’avis des observateurs des affaires israéliennes, quelle que soit l’issue de la guerre, et quels que soient les résultats obtenus, aussi performants qu’ils puissent être, l’avenir politique de l’actuel premier ministre et des partis qui le soutiennent est compromis. De plus, Netanyahu sera menacé, d’abord dans sa liberté, lorsqu’il ne bénéficiera plus de l’immunité et, dans sa vie, du fait que certains pensent que si les otages sont tués par le Hamas, leurs proches ne resteront pas sans réaction. Des renseignements non confirmés rapportent que le chef du Likoud aurait déjà reçu des menaces, actuellement objet d’investigations par les Services israéliens. Pour survivre à cette guerre, l’actuel premier ministre aura besoin d’un miracle, celui de pouvoir présenter à la fin de la guerre un bilan montrant l’élimination du Hamas militaire ou un affaiblissement notable de ses capacités.

2. Le Hamas ne peut compter que sur lui-même, Arabes et Iraniens sont prêts à le sacrifier pour des raisons différentes.

À l’extrémisme de la droite et de l’extrême droite en Israël répond l’extrémisme du Hamas. Créé à la fin de l’année 19872 et entré en politique en 2006, lorsqu’il a conduit un gouvernement, formé suite aux élections législatives de janvier 2006. Cette participation au gouvernement va nuire au Hamas et réduire sa popularité. L’Organisation a alors eu recours à un coup d’État en 2007, par lequel ses dirigeants ont évincé l’autorité palestinienne de Gaza pour s’accaparer le pouvoir dans la Bande et l’exercer de manière autoritaire. Certaines analyses soutiennent qu’Israël aurait encouragé cette montée du Hamas pour affaiblir l’autorité palestinienne et diminuer sa force de représentation du peuple palestinien.

En dépit de manœuvres politiques auxquelles le Hamas a recours dans ses discours, souvent ambigües, sur la reconnaissance d’Israël, le mouvement reste profondément ancré dans l’esprit de sa charte initiale établie en 1988 et qui consigne dans son préambule la phrase de Sayed Qutb « Israël existe et continuera à exister jusqu’à ce que l’islam l’abroge comme il a abrogé ce qui l’a précédé ». Le Hamas ne croit en aucune autre solution que le Djihad contre Israël. L’article 13 de la charte précise « Il n’y aura de solution à la cause palestinienne que par le jihad... initiatives, propositions et autres conférences internationales ne sont que perte de temps et activités futiles ».

Dans certaines circonstances, les responsables du Hamas prennent de la distance avec ladite charte. Ils évitent même de la publier sur le site de leur Organisation en espérant 

ainsi rester fréquentables dans les milieux internationaux et asseoir, ainsi, leur pouvoir. Ahmed Youssef, ex-conseiller d’Ismaïl Hanieh, avait prôné en 2011 la mise à l’écart de la charte en déclarant qu’elle n’était pas « une constitution rédigée comme une loi » et qu’elle « reflétait les vues de l’un des plus anciens dirigeants du mouvement et avait été ratifiée pendant le contexte particulier de l’insurrection de 1988, comme un cadre nécessaire pour faire face à une occupation implacable ». Le Hamas a même imaginé, en 2017, un autre projet de charte toujours sans suite. La charte souligne également l’appartenance du Hamas au courant des frères musulmans, un mouvement d’Islam politique qui admet de la flexibilité et le recours aux manœuvres politiques dans les moments de faiblesse.

Dans le contexte du lendemain du 7 octobre 2023, il semble que c’est cet extrémisme de la doctrine du Hamas qui prive ce dernier de certains soutiens au sein de la communauté internationale. Dans les manifestations à travers la planète pour dénoncer la violence israélienne dans la guerre à Gaza, les manifestants expriment le soutien au peuple palestinien, rares sont ceux qui font l’éloge du Hamas. Il en va de même des positions internationales qui stigmatisent le comportement israélien ; aucune position ne critique le ciblage des cadres du Hamas, elles se limitent à dénoncer les actions contre la population de Gaza. Même les médias arabes qui supportent la lutte palestinienne, parlent dans leurs grande majorité, de résistance palestinienne et non de résistance du Hamas.

Par ailleurs, l’historique du mouvement le prive de supporters dans le monde arabe où la débâcle des frères musulmans, notamment en Égypte, marginalise le Hamas en tant qu’Organisation affiliée au mouvement. Au sein de l’axe de la résistance que promeut l’Iran, le Hamas est mal vu par les bases du Hizbollah qui a dû confronter les combattants du Hamas lors de la guerre en Syrie ; cette dernière n’oublie également pas que le Hamas s’était rangé du côté des groupes qui ont combattu le régime. Si aujourd’hui l’axe de résistance semble parrainer le Hamas, force est de constater que le mouvement ne semble pas encore totalement admis. Dans son discours du vendredi 3 novembre, Hassan Nasrallah, leader de Hizbollah a eu du mal à expliquer à sa base la mobilisation totale pour la cause du Hamas. Il s’est limité à qualifier l’action du Hizbollah de solidarité avec le Hamas.

Le Hamas ne semble donc pas pouvoir disposer de chances de survie à la guerre actuelle à moins qu’il puisse, par ses propres moyens, vaincre l’appareil militaire israélien, le chasser de la bande de Gaza et conserver ainsi son pouvoir dans ce territoire.

Le Hamas semble, à priori, voué au même sort que la droite et l’extrême droite israéliennes. À moins que l’une puisse éradiquer l’autre, aucune des deux parties ne pourra survivre aux événements en cours à Gaza.

II. RELANCE PROBABLE DU PROCESSUS D’ÉTABLISSEMENT D’UN ÉTAT PALESTINIEN : LA DERNIÈRE CHANCE.

Si la guerre en cours dans la bande de Gaza aboutit, comme attendu, à la mise en marge des deux tendances extrémistes dans le conflit et la montée en puissance de tendances plus modérées, la recherche d’une solution de paix trouvera un cadre propice et un terrain fertile auprès d’autorités israéliennes et palestiniennes enclines à la paix. La communauté internationale semble aujourd’hui plus que jamais convaincue que cette solution ne peut être que celle des deux États.

1. La communauté internationale prête pour la solution des deux États ?

L’opinion publique internationale semble plus que jamais mobilisée pour soutenir le droit du peuple palestinien à établir son État indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale. Dans toutes les capitales du monde, de l’Asie à l’Amérique latine et des USA à l’Australie, comme en Europe, des manifestants ont scandé des slogans réclamant pour les Palestiniens le droit de disposer d’un État indépendant.

Si la cessation de la guerre actuelle semble marquer certaines divergences quant au moment d’instaurer le cessez-le-feu et la rationalité des objectifs fixés par Israël à son intervention militaire dans Gaza et sur la proportionnalité des mesures et moyens adoptés, l’issue politique de la guerre ne peut, de l’avis de tous, être autre qu’une solution finale et juste au conflit.

Rares sont les discours de protestation contre la guerre à Gaza, aussi bien dans les milieux populaires qu’officiels, qui mentionnent le Hamas. Cependant, ces discours, aussi bien dans les rues des capitales américaines, européennes, asiatiques, arabes ou nord-africaines, demandent la libération de la Palestine et le droit de son peuple à disposer de son État.

Dans les milieux officiels, chancelleries et gouvernements, la même tendance reste remarquée. Même les États les plus favorables aux thèses israéliennes et qui montrent peu de sensibilité aux violences israéliennes dans la guerre actuelle, sont à présent convaincus de la nécessité urgente de permettre aux Palestiniens d’avoir un État indépendant. Du président américain et son administration au chancelier allemand, en passant par les responsables européens, chinois, russes, japonais, australiens, arabes et autres, la solution à deux États fait l’unanimité.

Le mouvement en faveur de cette solution est tellement fort aujourd’hui que sa mise en œuvre semble trouver le moment propice dès la fin de la guerre en cours. La pression internationale devra alors s’employer pour faire échouer tout retour de la droite israélienne au pouvoir ainsi que ses appendices d’extrême droite. La société israélienne est consciente des préjudices que lui occasionne la politique de la droite et de l’extrême droite et des menaces que cette politique fait peser sur la sécurité des Israéliens. Mais cette conscience doit être renforcée par des actions internationales, notamment de la part des Américains qui doivent décréter la suspension des aides à Israël à chaque fois qu’il est gouverné par des gouvernements où siègent des ministres de l’extrême droite.

C’est au moment de la fin de la guerre actuelle que la pression internationale devra s’intensifier sur Israël pour passer directement et sans rupture au processus d’établissement de l’État palestinien. S’il est permis à Israël de tergiverser après la guerre, tous les sacrifices consentis par le peuple palestinien jusqu’à présent auraient été vains et le cycle des violences ne sera jamais rompu.

Le meilleur procédé serait aujourd’hui de conduire parallèlement deux processus :

- faire en sorte que la guerre se termine, au plutôt, à la fois par l’affaiblissement de l’extrême droite israélienne et du Hamas et ;

- préparer les conditions pour la création de l’État palestinien indépendant.

2. Une solution juste au conflit israélo-palestinien remettrait en scelle la diplomatie américaine au Moyen-Orient

• Retour américain au Moyen-Orient

Parmi les conséquences évidentes des derniers événements entre Israël et le Hamas figure, le retour en force des États-Unis d’Amérique au Moyen-Orient, après un désengagement qui a semblé caractériser la politique américaine ces dernières années. Le retrait progressif d’Iraq et de Syrie, les différends nés entre les Américains et leurs homologues saoudiens suite à l’Affaire Jamal Khashoggi ainsi que les divergences sur l’engagement du Royaume dans la guerre au Yémen et la déception saoudienne au vu de l’inertie américaine face aux attaques iraniennes sur des installations pétrolières saoudiennes, sont autant de facteurs qui ont laissé paraitre un certain désintérêt de la politique américaine au Moyen-Orient en dépit du maintien de certaines bases militaires dans la région en respect des accords de défense conclus avec des pays du Golfe. La région fut, pour certains internationalistes et géopolitologues, victime du balancement de la stratégie américaine vers l’Indopacifique.

Ce vide avait encouragé la Russie à s’imposer dans la région en capitalisant sur son intervention militaire en Syrie, et ouvert une fenêtre d’opportunité pour la diplomatie Chinoise qui a commencé par faciliter la reprise des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran et renforcer ses relations commerciales et économiques avec les pays du Golfe. Les tentatives de Moscou et de Pékin de s’implanter dans la région se sont illustrées par l’admission de l’Arabie saoudite, de l’Égypte et des Émirats arabes unis aux BRICS.

Si la guerre d’Ukraine avait renforcé la volonté de retour des USA au vieux continent pour contrer les ambitions russes en Europe, celle éclatée le 7 octobre entre Israël et le Hamas force le retour des Américains pour mettre fin aux ambitions iraniennes au Moyen-Orient. Jamais avant cette guerre, l’armada américaine n’a été aussi proche, et avec autant de moyens, de l’Iran et de ses proxys dans la région. Le langage américain envers l’Iran et ses satellites n’a jamais été aussi menaçant et clair que celui utilisé en ce mois d’octobre 2023. Le Président américain s’est rendu en personne en Israël et des bâtiments américains ont intercepté, en mer Rouge, des missiles yéménites tirés vers le Sud israélien.

• Capitaliser sur la situation actuelle dans la région, pour retourner la tendance antiaméricaine qui profite aux adversaires de Washington

L’administration américaine, qui s’est sérieusement engagée aussi bien militairement que diplomatiquement dans les événements qui ont suivi le 7 octobre, ne peut, sous peine de porter une grave atteinte à sa crédibilité, admettre que les choses reviennent au niveau où elles étaient avant le déclenchement de l’escalade militaire. De plus, les Américains, qui semblent vouloir marquer leur retour au Moyen-Orient pour y contrer la Russie, l’Iran et la Chine, se doivent de combattre le sentiment antiaméricain grandissant dans la région.

Si le statu quo demeure en Palestine, les USA enregistreront un double échec :

  • Hamas aura réussi à conserver son pouvoir à Gaza et à se renforcer aux dépends d’Israël, allié des USA. Ce succès sera également celui de l’Iran et de son axe de la résistance ;

  • si Hamas est écarté du pouvoir et qu’Israël revient à ses exactions contre le peuple palestinien en œuvrant pour une idée de grand Israël qui torpille la solution des deux États, les USA perdraient définitivement toute estime dans le monde arabe et ne pourraient plus être un facilitateur mondial pour des solutions dans la région.

L’administration américaine est peut-être devant sa dernière chance de pouvoir encore jouer un rôle dans la région. Chance qui réside dans une action qui viserait à mettre la pression sur Israël afin de le pousser à s’engager sérieusement dans un processus de paix qui aboutirait à la solution des deux États. C’est la seule voie pour les USA de justifier le déplacement spectaculaire vers le Moyen-Orient de ses impressionnantes machines, militaire, diplomatique et de renseignement.

CONCLUSION

L’attaque menée le 7 octobre 2023, par les brigades Al Qassam dans le territoire israélien mitoyen de la bande de Gaza, est venue rappeler à la communauté internationale que l’émergence de nouveaux conflits dans le monde ne peut faire oublier le conflit israélo- palestinien qui dure depuis plus de soixante-dix ans, sans trouver de solution juste qui permettrait de répondre au besoin des deux parties concernées de vivre dans la paix.

Ce conflit, né au lendemain de la Première Guerre mondiale, a survécu à plusieurs autres conflits qui lui sont postérieurs. Il a survécu à la guerre du Vietnam, à celles d’Afghanistan (russe et américaine) et à celle de l’Irak (première et deuxième). Il a survécu aux guerres menées par la communauté internationale contre Daech et Al Qaeda. À l’aube de la troisième décennie du XXIème siècle, ce conflit fut un moment oublié au profit de la guerre en Ukraine et des tensions de la zone indopacifique, avant qu’il refasse surface en ce mois d’octobre 2023. Il revient certainement rappeler à l’ONU que le temps ne peut, à lui seul, au prix d’une procrastination sans fin, solutionner des conflits ou résoudre des crises, principalement lorsque ces crises ou conflits sont existentiels. Le conflit Israélo-palestinien est mutuellement existentiel entre Israël et les Palestiniens. En effet, aussi longtemps que le conflit puisse durer, il ne saurait y avoir de vie dans la souveraineté, l’indépendance, la paix et la sécurité pour l’une des parties, sans que l’autre ne puisse vivre dans les mêmes conditions. À défaut, la guerre, la peur et l’instabilité continueront de dominer dans un climat où toute accalmie n’est qu’annonciatrice de tempête. Il n’existe pour chacune des parties que deux solutions :

- éradiquer l’autre et l’exterminer de manière à couper toutes ses racines et toute possibilité de résurgence, ou ;

- accepter l’autre et reconnaitre son droit à la vie digne, dans la souveraineté, la paix, l’indépendance et la sécurité.

Comme aucune des deux parties ne peut, quelles que soient les forces qui la soutiennent, éradiquer l’autre ; il ne reste que la deuxième solution. Celle-ci ne peut être le résultat du seul écoulement du temps ou de procrastination à l’infini.

Les parties extrémistes, qui cherchent à s’éliminer l’une l’autre, ayant tendance à sortir affaiblies de cette guerre, la fenêtre s’ouvre pour des visions plus raisonnables afin d’œuvrer pour la résolution du conflit.

 

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1. Selon the Times of Israël : un responsable des services de renseignement égyptiens a déclaré qu’Israël avait ignoré les avertissements répétés selon lesquels Hamas préparait « quelque chose de gigantesque ». Voir : https://fr.timesofisrael.com/egypte-israel-a-ignore-les- avertissements-repetes-de-menace-enorme/

2. Le Hamas est donc né dans un contexte de défaite palestinienne, soit 5 ans après l’encerclement puis l’expulsion de l’OLP de Beyrouth en 1982.

 

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