Publications /
Policy Paper

Back
L’exploration et la production pétrolière en Afrique depuis 2014 Évolution des acteurs et de leurs stratégies
Authors
Benjamin Augé
May 23, 2018

La baisse des cours du pétrole qui s’est amorcée en 2014 a considérablement influencé les stratégies des acteurs pétroliers en Afrique. Baisse des budgets d’exploration, disparition ou rachat de sociétés affaiblies, réorganisation ou repli des majors traditionnelles, création de nouvelles firmes et arrivées de majors étatiques intéressées par l’effet d’aubaine généré par la crise : le continent n’a pas échappé à une modification en profondeur de son secteur pétrolier.

Pour autant, la crise n’a pas redéfini la géographie de la production africaine dont les principaux géants restent et resteront le Nigeria, l’Angola, l’Algérie et la Libye, au moins en termes de réserves. Néanmoins, de nouvelles zones ont pu émerger grâce notamment à la prise de risques de juniors soutenues par de puissants fonds d’investissement qui ont cru au potentiel de géologues et d’équipes techniques autrefois salariés des majors. C’est d’abord le cas de l’Afrique de l’Est pour le pétrole, avec l’Ouganda et le Kenya, ainsi que pour le gaz, avec la Tanzanie et le Mozambique. Plusieurs découvertes pétrolières et gazières de grande importance ont pu être effectuées dans un nouveau bassin situé entre la Mauritanie et la Guinée. Aucun modèle de stratégie africaine ne se dessine cependant, chaque société faisant des choix d’acquisition et d’exploration propres.

Si les acteurs traditionnels, comme les majors occidentales ENI et Total, ont poursuivi leurs investissements sur ce continent qui joue un rôle central dans leur production globale, des majors, comme ConocoPhilipps, sont tout simplement parties alors que d’autres ont effectué de nouvelles acquisitions risquées, comme BP et ExxonMobil.

Quant aux majors d’État asiatiques, les investissements dans l’exploration/production ont plutôt stagné pour la Chine (en ce qui concerne CNPC et Sinopec notamment) alors que certaines autres ont largement renforcé leur présence comme l’indonésienne Pertamina ou encore l’ONGC indienne.

Le repli des banques traditionnelles touchées par la crise financière de 2008 a conduit à un manque de fonds disponibles pour le secteur pétrolier en Afrique, et celui-ci s’est encore accentué depuis 2014 avec la baisse des cours. Les sociétés pétrolières privées et étatiques africaines ont ainsi diversifié leurs sources de financement. Comme Glencore au Tchad,

les traders se sont lancés dans des prêts au secteur extractif et les banques chinoises prêtent aussi davantage de fonds, y compris pour des projets n’incluant pas d’acteur chinois. Quant aux banques africaines, principalement nigérianes et sud-africaines, elles ont aussi joué un rôle de plus en plus moteur.

La crise a également poussé à davantage de coopération entre les différents types de sociétés pétrolières. Une junior comme Tullow Oil a par exemple souhaité travailler avec une major occidentale, Total, et une major d’État chinoise, Cnooc, pour développer les ressources qu’elle avait découvertes en Ouganda. Ces types de coopération et de partage du risque se sont développés durant la crise : il y a désormais moins de permis et de projets développés par un acteur unique. Enfin, la crise a favorisé l’arrivée des sociétés de services, qui ont été durement touchées par la baisse des contrats et la pression sur les prix de la part des opérateurs, et se sont investies dans la production. En prenant elles-mêmes des risques, ces sociétés de services s’assurent de l’utilisation de leur compétence et savoir-faire. Ceci protège également leur modèle économique, puisqu’elles sont devenues décisionnaires lors des développements pétroliers.

RELATED CONTENT

  • Authors
    April 5, 2023
    The Policy Center for the New South and the Economic Research Forum held on March 20 a workshop titled ‘Stabilization and adjustment towards inclusive and sustainable policies in MENA: The Moroccan case study’. The event took place at the PCNS headquarters in Rabat, Morocco. It brought together renowned Moroccan economists and scholars to discuss the issue of public debt sustainability in the context of the Moroccan economy. It was an occasion to revisit the main features of the Mor ...
  • Authors
    April 5, 2023
    Davantage qu'un acte de piété personnelle, le Ramadan est un phénomène éminemment social. Il renvoie à des dimensions complexes : de religion, de solidarité, d’éthique et aussi d’économie. Le jeûne du mois de Ramadan est évidemment l'une des obligations rituelles de l'Islam. Mais, plus que religieux (qui renvoie à l'institutionnalisation et l'objectivation), le Siyam est un fait spirituel (qui renvoie davantage à l’individuation et la subjectivation). Il donne lieu à des prières sur ...
  • Authors
    April 4, 2023
    In 2010, when I was one of the vice presidents at the World Bank, colleagues I and published a very upbeat book  about the possibility of emerging and developing economies replacing advanced countries as engines of global economic growth. While the latter would be grappling with the aftermath of the global financial crisis, the former, already growing at a faster pace in the previous decade and accounting for more than half of the annual increases in global GDP, had largely shown an ...
  • April 04, 2023
    يرتبـط مفهـوم الطبقـة الوسـطى ارتباطـاً جوهريـاً بمفهـوم الطبقـة الاجتماعية وبدراسـة التقسـيم الاجتماعي كما يتطلــب توســيع هذه الطبقــة  حركيــة اجتماعيــة هدفهــا القضــاء علــى الفقــر ...
  • April 4, 2023
    Face à l’essor des cryptomonnaies, les banques centrales sont en train de réagir en lançant leurs propres monnaies numériques. L’objet de ce Policy Brief est de faire le point sur la préparation des monnaies numériques de banques centrales (MNBC) par les autorités monétaires, un processus qui concerne tous les pays, émergents, en développement, et plus avancés. Il s’agit aussi d’analyser les conditions et certaines des conséquences (pour les banques, pour l’inclusion fin ...
  • April 4, 2023
    Faced with the rise of cryptocurrencies, central banks are responding by launching their digital currencies. The purpose of this Policy Brief is to provide an update on the preparation of central bank digital currencies (CBDs) by monetary authorities, a process that concerns all emerging, developing, and more advanced countries. It is also about analyzing the conditions and some of the consequences (for banks, for financial inclusion, for the conduct of monetary policy...) of such a ...
  • Authors
    Masood Ahmed
    April 3, 2023
    This blog was originally published on Center for Global Development (CGD)   To better respond to today’s global crises, the MDBs must transform themselves. The MDB Reform Accelerator is mobilizing the evidence-based analysis and strategic outreach needed to ensure MDB reform delivers real results for development, climate, and other global challenges.  The world has changed since the creation of the International Monetary Fund and the World Bank—the world’s first international fin ...
  • March 31, 2023
    L’Afrique est plurielle, comme le sont les investissements chinois sur son continent. Cette étude montre que, contrairement à ce que l’on mettait en avant durant la décennie 2010, ces investissements ne se limitent pas à l’exploitation du sous-sol africain. Les opérateurs chinois, privilégiant le long terme, se montrent le plus souvent patients et discrets, ne ciblant pas les seuls investissements miniers. Concernant les secteurs principalement bénéficiaires de ces investissements, ...