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Opinion
La conférence « A Brave New World, Adapting to a changing security landscape », organisée par Friends of Europe, le 20 septembre 2018 à Bruxelles, a consisté en des tables rondes auxquelles ont participé Bouchra Rahmouni Benhida, Senior Research Fellow d'OCP Policy Center et Amal El Ouassif, Research Assistant, notamment sur les plus grands défis de la politique extérieure européenne. « C’était très gratifiant de voir distribuées, aujourd’hui, les conclusions sur la migration d’un brainstorming global auquel j’ai participé en juillet dernier», a souligné Bouchra Rahmouni Benhida.
En introduction aux plénières, Julian King, Commissaire européen à l'Union pour la sécurité, a évoqué les menaces auxquelles font face les Etats européens, telles que le cyber-terrorisme.
« Des gens essaient de nous faire mal, de mettre en question nos modes de vie, nos valeurs et la façon dont nos communautés vivent ensemble », a-t-il affirmé. Le Brexit ne doit pas changer la coopération sur ce point, d'autant qu'un glissement est en cours sur les capacités de réponse : « Il faut de plus en plus clairement une volonté politique de déployer des forces », selon Julian King.
S'interrogeant sur l'apparition d'un nouveau paradigme, un expert français a posé une question sur le fait que « le président Emmanuel Macron propose une force européenne hors OTAN et UE, mais avec la Grande-Bretagne, pour intervenir dans sa zone d'influence ». « Vous tirez une conclusion à partir d'un seul aspect, a répondu Julian King. La sécurité reste plus vaste et elle est gérée collectivement, comme le terrorisme. Cela étant, l'idée d'une réponse européenne en termes de déploiement militaire commun est en train d'avancer ».
L'industrie européenne de la défense n'existe pas mais reste très fragmentée le long de lignes nationales, selon Lowri Evans, directrice générale de la Commission européenne pour le Marché intérieur, l'industrie, l'entrepreneuriat et les PME. « Si nous développons des systèmes nationaux qui ne se parlent pas, rien ne fonctionnera. La volonté politique existe d'une approche plus collective, et l'UE facilite la coopération, mais c'est tout. Ne pas réformer notre approche serait complètement irresponsable, compte tenu de l'évolution de la menace globale ».
Nouvelles capacités face à de nouvelles menaces
L'intelligence artificielle et la robotique changent le champ militaire, mais des questions se posent sur les capacités de contrôle humain dans la guerre moderne. Faut-il un code de conduite ou un accord international sur l'intelligence artificielle, similaire à ceux qui ont été adoptés sur les armes nucléaires et chimiques ?
« Au cours des 10 dernières années, nous avons beaucoup parlé de partage d'informations sur la cyber-sécurité, mais finalement le plus efficace a été de nous asseoir à une table pour parler de la menace, des fake news par exemple, des hold-ups électroniques pratiqués auprès des banques, etc, a répondu Edvinas Kerza, vice-ministre lithuanien de la Défense. Nous avons neuf pays (France, Allemagne, Pays-Bas, Finlande, Pologne, Estonie, Lithuanie, Roumanie, Slovénie) qui se parlent pour partager non plus des informations mais des compétences et du personnel, ce qui n'implique pas des moyens énormes et peut concerner les petits pays ».
Frank Sauer, chercheur à l'Université de Munich, a plaidé pour le contrôle des armes, de même que Mary Wareham, coordinatrice de la campagne Stop Killer Robots. Il n'est pas question d'interdire l'intelligence artificielle, a-t-elle dit, mais « l’absence de contrôle humain sur l'identification des cibles et l'usage de la force à leur encontre ». La France a mis le sujet sur la table en 2013 à Genève, et 26 pays se sont ensuite embarqués dans la discussion – dont deux d’Europe seulement - pour empêcher l’extension de cet armement dénué de contrôle humain.
Un nouveau départ pour une vieille alliance
Il n’a été que peu question de l’unité de l’Otan, mise à l’épreuve par le président américain Donald Trump, qui préfère les arrangements bilatéraux à des opérations de l’Alliance transatlantique.
José Alberto de Azeredo Lopes, le ministre de la Défense du Portugal a insisté sur la nécessité d’une nouvelle doctrine de l’Otan. « On parle souvent de vin nouveau dans de vieilles bouteilles. A l’Otan, on doit éviter de parler de vieux vin dans une vieille bouteille ! Pas de retour chariot dans les citations L’Otan avait pour thème obsessionnel son organisation, et l’institution se porte mieux aujourd’hui. L’Otan résulte de la volonté de ses Etats membres, qui doivent être plus unis sur les défis, de manière à ce que l’Otan serve à tous les membres et non à certains ».
« On se prépare à la paix, a renchéri Frank Bakke-Jensen, ministre de la Défense de la Norvège. Je vis à 2000 km au Nord de Bruxelles, ce qui me mènerait à Marrakech si je partais vers le Sud. Je reste près du cœur de l’Europe, pour conserver ses valeurs et son état d’esprit de paix. Certes, les activités militaires russes nous inquiètent, de même que les tentatives de réduire la stabilité, mais nous œuvrons à la paix ».
L’Otan ne choisit pas ses défis, liés aux nouvelles technologies, a rappelé Benedetta Berti, chef de la planification politique auprès du Secrétaire général de l’Otan. « Un éventail plus large de menaces existe néanmoins avec la crise de l’Etat, de la gouvernance, l’instabilité et la fragilité dans notre voisinage. L’aspect militaire n’est pas le seul dans le contre-terrorisme : l’économie, le développement, l’humanitaire sont aussi importants, et ce sont d’autres institutions qui s’en occupent. Nous travaillons de plus en plus avec des acteurs locaux pour entraîner des forces comme en Afghanistan, ou avec nos partenaires dans la région MENA, du Maroc à l’Egypte en passant par la Tunisie, importants car ils ont une meilleure compréhension des réalités locales ».
Au final, Bouchra Rahmouni Benhida, Senior Fellow d’OCP Policy Center, a estimé les « débats ouverts, instructifs et assez provocateurs pour stimuler des idées nouvelles au sujet du contexte sécuritaire ».