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Opinion
A la fin avril 2021, Total (aujourd’hui TotalEnergies) annonçait le retrait de son personnel du site d’Afungi, dans le nord-est du Mozambique, et déclarait la force majeure pour le projet gazier Mozambique LNG. Ce projet, qui devrait normalement être opérationnel en 2024, porte sur la production et l’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL) à partir de très importantes ressources de gaz naturel découvertes dans le bassin de Rovuma (Zone offshore 1) en mer. Ce retrait temporaire du groupe français d’un projet majeur (le coût de la première phase est de $20 milliards) faisait suite à la prise de la ville de Palma, dans la province de Cabo Delgado, par des forces plus ou moins proches de Daesh (l’Etat islamique). Palma est voisine du site du projet Mozambique LNG. L’intervention d’unités militaires étrangères provenant de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et du Rwanda a permis d’éloigner cette menace mais celle-ci est loin d’avoir disparu.
Trois projets de production et d’exportation de GNL
Ce retard significatif pour ce grand projet gazier ne signifie pas que le Mozambique ne deviendra pas prochainement un producteur et exportateur de GNL pour la première fois dans son histoire. Sauf événement exceptionnel et non prévisible à ce jour, ce devrait être le cas dès le second semestre 2022. Il y a, en effet, non pas un, mais trois projets de GNL dans le pays. Outre Mozambique LNG, dont l’opérateur est TotalEnergies, il y a également Coral Sul FLNG et Rovuma LNG. Ces deux derniers projets sont sous la responsabilité d’un autre consortium, dont les acteurs les plus importants sont Eni (Italie), ExxonMobil (Etats-Unis) et la China National Petroleum Corporation (CNPC). Les ressources gazières proviendront de la Zone offshore 4. Pour Coral Sul, les installations de liquéfaction du gaz seront en mer (installations flottantes – Floating LNG ou FLNG) alors que pour les deux autres, les trains de liquéfaction du gaz naturel seront à terre.
L’avancement du projet Coral Sul n’a pas été perturbé par les graves événements qui se déroulent dans la province de Cabo Delgado, justement du fait de son statut offshore. Eni estime toujours que le calendrier prévu sera respecté. La capacité de Coral Sul sera de 3,4 millions de tonnes de GNL par an. Ce GNL sera produit à partir d’une base de ressources gazières évaluée à 450 milliards de mètres cubes. Coral Sul sera la première usine de liquéfaction du gaz installée en mer profonde au large de l’Afrique.
Le Mozambique sera un gros exportateur de GNL dans les prochaines années
Ce premier projet de GNL est le plus petit des trois qui entreront en production au Mozambique dans les prochaines années. La capacité de Mozambique LNG sera en effet de 13,1 millions de tonnes/an (Mt/an) et celle de Rovuma LNG de 15,2 Mt/an. Cela représentera une capacité totale de production et d’exportation de GNL de près de 32 Mt/an pour le Mozambique après 2024, sous réserve de l’impact de problèmes politiques et de sécurité d’ici là, comme cela a été le cas en mars 2021. Mais, au-delà du calendrier, il ne fait aucun doute que ce pays deviendra un gros exportateur de GNL au cours de cette décennie. Rappelons que pour Mozambique LNG, le volume indiqué ne correspond qu’à la première phase du projet.
Comme pour quasiment tous les autres projets de GNL dans des pays en développement, les opérateurs sont des compagnies pétrolières étrangères car elles sont les seules actuellement à pouvoir financer, développer et exploiter des projets d’une telle taille, d’un tel coût et d’une telle complexité technologique. La société nationale du Mozambique, Empresa Nacional de Hidrocarbonetos (ENH), détient une participation de 10% sur la Zone offshore 4. Sa participation est par ailleurs de 15% dans Mozambique LNG. Elle est donc impliquée, en tant que partenaire minoritaire, dans les trois projets évoqués. De plus, des volumes de gaz de pétrole liquéfiés (GPL – butane et propane) seront commercialisés sur le marché national pour améliorer l’accès de la population à l’énergie. Il y aura aussi des retombées énergétiques, agricoles et environnementales avec des projets de valorisation de déchets et de plantes oléagineuses en vue de générer des biocarburants et des initiatives en matière de REDD (réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation forestières). Mais, pour l’essentiel, ces trois projets gaziers visent à exporter du GNL vers les marchés mondiaux, ce qui débouchera sur des flux financiers très importants au cours des prochaines décennies.
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