AD Talks 2020: L’Etat providence dans le grand Sud : le retour d’un grand absent ?
L’État providence en tant que système voué à la satisfaction des besoins sociaux de ses citoyens a connu une forte popularité à partir du début du 20ème siècle jusqu’au milieu/fin des années 1970. Plusieurs définitions sont avancées dans la littérature et pour l’essentiel elles tournent autour des idées d’un État essentiellement tourné vers le bien être des ménages, d’un État qui se substitue au marché si celui-ci est défaillant ou encore un État providence qui adopte une approche plutôt universaliste du bien-être social. Le recul observé de la pensée économique keynésienne à partir du milieu des années 1970 ainsi que l’arrivée aux affaires des partisans du « laissez-faire » tels que Ronald Reagan et Margaret Thatcher, seront les moteurs d’un rétrécissement des missions dévolues aux États surtout ceux dans les économies en développement. Le fameux consensus de Washington et les plans d’ajustement d’alors dans les États dans les pays en développement vont cantonner leurs missions aux tâches régaliennes (de sécurité et défense) et surtout à la restauration et préservation des équilibres macroéconomiques. Les secteurs sociaux (éducation, santé, transferts monétaires vers les ménages les plus pauvres etc.) seront les parents pauvres de la politique publique pendant toutes ces décennies. Les relatives faibles performances enregistrées dans la lutte contre la pauvreté et pour un accès à une éducation et des structures sanitaires de qualité démontrent à suffisance le coût social de ces politiques. Depuis une décennie (crise de 2008) et surtout en 2020 avec la crise sanitaire et économique les Etats (y compris ceux des économies en développement) rivalisent d’ingéniosité et d’audace dans la mise en place de politiques sociales d’envergure (ex. Tadamon au Maroc, Novissi au Togo) avec la mise en place d’un revenu quasi-universel. Ce retour de l’État providence notamment en Afrique est-il le signe d’une reconnaissance des erreurs du passé ? (‘Did we lose decades ?’ pour paraphraser l’économiste William Easterly) Ce retour des politiques sociales audacieuses et assumées s’inscrivent-il dans un horizon juste conjoncturel ou assiste-t-on a un réel changement de paradigme ? Pour une Afrique qui se montre résiliente face aux crises et ambitieuse dans son devenir quel arbitrage effectuer entre le dilemme d’un environnement macroéconomique saint et la jeunesse de sa population qui nécessite des politiques sociales fortes pour l’accompagner dans son épanouissement ? autrement dit de quels leviers dispose-t-on pour financer cet État providence ? Moderator : Claude Grunitzky, Founder, Trace and True Africa Speakers : - Abdelhak Bassou, Senior Fellow, Policy Center for the New South - Sergio Suchodolski, President, Banco de Desenvolvimento de Minas Gerais - Patricia Ahanda, Founder and CEO, LYDEXPERIENCE (Emerging Leader) - Adil El Madani, Private Sector Development Expert, Enable (Emerging Leader) - Abdoullah Coulibaly, President, Bamako Forum